Rentrée littéraire janvier 2025. — Notre sélection des livres à lire impérativement

La rédaction de L’Explorateur littéraire vous a concocté ses meilleures lectures pour cette rentrée littéraire 2025. Petit tour d’horizon de romans à ne surtout pas manquer. Un thème se dégage de cette sélection comme des nouveaux romans parus en janvier, ce thème c’est celui de l’exploration des relations familiales.

Blandine Rinkel, La Faille

La faille, c’est la famille estropiée — sans « m ». C’est quoi d’ailleurs une famille ? Et comme s’en émanciper ? 

la faille - blandine rinkel

 

« Quand j’écris le mot famille, allez savoir pourquoi, je mange le m – on lit faille.
C’est depuis cette fêlure que j’ai écrit ce livre. D’aussi loin que je me souvienne, sortir de chez moi allait avec un immense soulagement et, plus secrète, une profonde joie. L’extérieur était une promesse. Là où certains voient un refuge, d’autres voient une prison. Ceux-là préfèrent la fuite à l’ancrage, et s’inquiètent d’une vie trop normée. C’est à ces personnes que je m’intéresse ici : celles qui, par instinct, se méfient du familier. Celles qui se sentent fauves, désaxées, intimement exilées. Celles que le groupe a expulsé, ou qui le rejettent, pour des raisons intimes, politiques ou métaphysiques – tout à la fois. Celles qui, tout en aimant leur foyer, s’y sentent parfois piégées. Celles qui refusent, ne parviennent pas, ou n’aspirent pas, à s’établir.

Toutes celles qui doivent couper pour rester vivantes. »

La Faille est le troisième roman de Blandine Rinkel, après L’Abandon des prétentions (2017) et Vers la violence (2022).

Roman paru aux éditions Stock, 20 euros. 

Vanessa Springora, Patronyme

Après son roman coup de poing, Le Consentement (2020), depuis adapté au cinéma, Vanessa Springora nous livre un autre récit intimiste sur les origines de son nom de famille. Quête qui la mènera jusqu’en Tchéquie. 

Patronyme - Vanessa Springora

 

Attendue sur le plateau de La Grande Librairie pour parler de son livre, Le Consentement, l’autrice est appelée par la police pour venir reconnaître le corps sans vie de son père, qu’elle n’a pas revu depuis dix ans. Dans l’appartement de banlieue parisienne où il vivait, et qui fut jadis celui de ses grands-parents, elle est confrontée à la matérialisation de la folie de cet homme toxique, mythomane et misanthrope, devenu pour elle un étranger. Tandis qu’elle s’interroge, tout en vidant les lieux, sur sa personnalité énigmatique, elle tombe avec effroi sur deux photos de jeunesse de son grand-père paternel, portant les insignes nazis. La version familiale d’un citoyen tchèque enrôlé de force dans l’armée allemande après l’invasion de son pays par le Reich, puis déserteur caché en France par celle qui allait devenir sa femme, et travaillant pour les Américains à la Libération avant de devenir «  réfugié privilégié  » en tant que dissident du régime communiste, serait-elle mensongère  ?

C’est le début d’une traque obsessionnelle pour comprendre qui était ce grand-père dont elle porte le nom d’emprunt, quelle était sa véritable identité, et de quelle manière il a pu, ou non, «  consentir  », voire collaborer activement, à la barbarie. Au fil de recherches qui s’étendront sur deux années, s’appuyant sur les documents familiaux et les archives tchèques, allemandes et françaises, elle part en quête de témoins, qu’elle retrouvera en Moravie, pour recomposer le puzzle d’un itinéraire plausible, auquel il manquera toujours des pièces. Comment en serait-il autrement dans une Tchécoslovaquie qui a changé cinq fois de frontières, de nationalité, de régime, prise en tenaille entre les deux totalitarismes du XXème siècle  ? À travers le parcours accidenté d’un jeune homme pris dans la tourmente de l’Histoire, c’est toute la tragédie du XXème siècle qui ressurgit, au moment où la guerre qui fait rage sur notre continent ravive à la fois la mémoire du passé et la crainte d’un avenir de sauvagerie.

Dans ce texte kaléidoscopique, alternant fiction et analyse, récit de voyage, légendes familiales, versions alternatives et compagnonnage avec Kafka, Gombrowicz, Zweig et Kundera, Vanessa Springora questionne le roman de ses origines, les péripéties de son nom de famille et la mythologie des figures masculines de son enfance, dans une tentative d’élucidation de leurs destins contrariés. Éclairant l’existence de son père, et la sienne, à l’aune de ses découvertes, elle livre une réflexion sur le caractère implacable de la généalogie et la puissance dévastatrice du non-dit.

Éditions Grasset, 22 euros.  

Christophe Claro, Des milliers de ronds dans l’eau

Avec Des milliers de ronds dans l’eau, l’auteur de La Maison indigène (2020), revoit sur ses racines, son père, sa mère, et sa vocation d’écrivain qu’il tente d’expliquer. 

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Dans ce livre où la folie d’écrire produit “des milliers de ronds” dans l’eau de la mémoire, l’auteur de “La Maison indigène” prolonge l’exploration à la fois poignante et ironique de ses origines d’écrivain – afin de vérifier sans doute la fameuse hypothèse de Proust : “La vraie vie, la vie enfin découverte et éclaircie, la seule vie par conséquent pleinement vécue, c’est la littérature.”

Éditions Actes Sud, 19 euros. 

Constantin Alexandrakis, L’Hospitalité du démon

L’histoire d’un père qui se souvient lui-même de son enfance. Un roman loin du manichéisme et du « bien comme il faut ». 

Constantin Alexandrakis, L’Hospitalité du démon

 

 

Peu après la naissance de sa fille, « le Père » se voit rattrapé par des souvenirs d’attouchements subis dans l’enfance. Pour conjurer sa peur de la répétition, il ambitionne de cartographier le « Grand Continent des Violences Sexuelles ». Cette traversée périlleuse, entre farce et cauchemar, durera six ans.
Dans un Danemark imaginaire, Constantin Alexandrakis sonde d’une façon iconoclaste un ressenti masculin face aux « abus de position dominante », sans se laisser réduire à un point de vue victimaire.

Éditions Gallimard, 20 euros. 

Emanuele Trevi, La Maison du magicien

La mort de son père, Mario Trevi, ramène le fils sur ses traces. Emanuele Trevi prend alors le parti de retourner au pays de l’enfance, la sienne mais aussi celle de son père. Que sait-on finalement du père ? 

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Le voyage intérieur d’un fils en quête d’un père insaisissable, par-delà sa mort, entre émotion, intimité et tendre ironie, où l’écriture semble être le seul chemin de guérison. Enfant, Emanuele apprit très vite que pour survivre dans l’orbite de son père, il était préférable qu’il en reste un personnage secondaire. Même si sa mère répétait à tout bout de champ « Tu sais comment il est », justement Emanuele n’a jamais vraiment su qui était cet homme imprévisible, un « Rubik’s Cube souriant et moustachu ». À la mort de celui-ci, il reste un appartement où subsistent encore les souvenirs des vies et des chagrins qu’il a guéris, huilés et redressés. Car son père, Mario Trevi, était un psychanalyste jungien renommé, un professeur-guérisseur, magicien capable de réparer les âmes blessées.

Décidant d’acheter cet appartement dont personne ne veut et de s’y installer, Emanuele y croise une présence invisible, une mystérieuse « visiteuse » nocturne qui entre à son insu et se plaît à déplacer des objets.  

Il y emploie une femme de ménage, surnommée « La Dégénérée », qui fait plus de désordre que de ménage, et qu’il rêve de licencier. Et entame une relation presque malgré lui avec la nièce de cette dernière, « Paradisa », jeune prostituée péruvienne. Cherchant coûte que coûte à résoudre l’énigme de son géniteur, Emanuele revisite l’histoire familiale, l’enfance de son père ainsi que son passé de résistant communiste. En mêlant souvenirs personnels, littérature, astrologie et psychanalyse, l’auteur tente de saisir la vérité enseignée par les événements sur les êtres et sur la vie. Emanuele Trevi signe son roman le plus personnel. Dans un style limpide, il livre un texte enlevé et tendre, drôle et inattendu.

Éditions Philippe Rey, 20 euros.

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Adèle Deuez
Passionnée de littérature et de philosophie, j’ai signé de nombreuses chroniques pour L’Explorateur Littéraire, avec une attention particulière au style, à la pensée et aux voix singulières.
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